Depuis plusieurs années, associations, habitants victimes de fissures dans leur maison et élus se battent pour se faire entendre. Sans trop de résultats. Un phénomène qui risque de s’amplifier avec la sécheresse qui sévit cet été.
Katy PARIS
Publié le 12/09/2022 à 07h10
Ce mardi 6 septembre 2022, au Mans, la salle Henri-Barbin était bien remplie. Habitants et élus, ils étaient plus d’une cinquantaine à avoir répondu à l’invitation de l’association Urgence maisons fissurées-Sarthe.
10, 4 millions d’habitations seront touchées
Ce phénomène, connu maintenant depuis plusieurs années, plonge des centaines de propriétaires sarthois dans le désarroi le plus total. Construites sur des sols argileux, leurs maisons subissent des mouvements de retrait-gonflement de l’argile (RGA) dû au manque d’eau. La sécheresse de cet été ne va faire qu’empirer les choses.
Certains habitants, pas encore touchés par ce fléau, sont venus pour se renseigner et connaitre les démarches à suivre. » Anticiper, vu le phénomène d’ampleur nationale, je préfère, » concède un Arnageois. Mohamed Benyahia, président de l’association Urgence Maisons fissurées-Sarthe, chiffre à l’appui, confirme. » En France, 10,4 millions d’habitations sont très fortement exposées au phénomène RGA, soit près de la moitié construites après 1976. Les trois quarts des communes françaises ont plus de 50% de maisons exposées ».
« Vous n’avez qu’à raboter vos portes »
Au Mans, 109 habitations ont été déclarées en mairies, en Sarthe, le chiffre n’est pas encore connu. « Mais il y a aussi tous les gens qui ne souhaitent pas faire quelque chose, tellement c’est un parcours de combattant, » constate amèrement Mohamed Benyahia.
Et pour preuve, ces témoignages alarmants. Comme cette habitante de Saint-Martin-des-Monts, près de la Ferté-Bernard, venue raconter le calvaire qu’elle vit depuis 2003, date de l’apparition des premières fissures. » Toutes les pièces de la maison sont touchées, du sol au plafond et j’en découvre tous les jours. » Pourtant, la retraitée a une lueur d’espoir lorsque sa commune est reconnue en état de catastrophe naturelle pour l’année 2020. » Un expert indépendant est venu mais ne s’est passé comme je l’espérais, me disant que si mes portes ne fermaient plus, il fallait faire venir un menuisier pour les raboter. Que j’avais du temps avant que l’eau ne s’infiltre dans les fissures… Bref, il a fini par conclure que cela n’avait rien à voir avec le sol alors que 93% de la commune de Saint-Martin-des-Monts est situé sur un terrain argileux. »A Coulaines, cet été, cette propriétaire a vu » les fissures présentes depuis 2021 s’agrandir de plusieurs centimètres. Les baies vitrées ne ferment plus «
3000 € pour une étude de sol
Saint-Saturnin, Coulaines, Saint-Michel-de-Chavaignes, Sargé, Le Mans … Tous ses habitants qui témoignent sont totalement désarmés. » Nous sommes livrés à nous-mêmes et c’est un véritable chemin de croix. Déjà rien que pour avoir une étude de sol. «
En Sarthe, les sociétés qui s’occupent de ce genre de travaux sont rares et débordées. » Il y a au moins un an d’attente et c’est, un budget de 3000€ « , concède un habitant de La Chapelle-Saint-Aubin.
Un combat qui semble perdu d’avance pour beaucoup. » Nous ne sommes pas entendus, même les élus paraissent totalement démunis face à nos situations. »
Des demandes mais pas de résultats
L’association Urgence Maisons Fissurées-Sarthe, qui comptent près de 160 adhérents, et qui parait bien esseulée dans ce combat, réclame au niveau départemental un plan d’urgence avec la sauvegarde des bâtiments, le financement des études de sols pour tous les sinistrés, le recours systématique des communes au tribunal administratif et la mise en place urgente d’une commission de suivi avec un référent dans chaque commune.
» Quand on voit l’état psychologique des personnes qui subissent ce fléau, c’est vraiment lamentable de les laisser dans un tel désarroi. Certains ont tout perdu, leur maison, leur famille, leur santé. Et avec la sécheresse, cela va encore empirer. Il faut prendre ce problème à bras-le-corps.
