Arrêté du 21 mars 2023 portant reconnaissance de l’état de catastrophe naturelle publié au journal officiel du 13 Avril 2023 – NOR : IOME2307449A
Extrait du Journal officiel
DÉPARTEMENT DE LA SARTHE
ANNEXE II : COMMUNES NON RECONNUES
Mouvements de terrain différentiels consécutifs à la sécheresse et à la réhydratation des sols
Communes
Début de période
Fin de période
Chapelle-d’Aligné (La)
07/01/2021
31/12/2021
Procédures :
Le maire de la commune dispose de 2 mois pour formuler des recours gracieux ou auprès du tribunal administratif !
Parallèlement, les sinistrés de la commune, peuvent contester cette décision, en rejoignant la procédure de recours collectif auprès du tribunal administratif de Nantes, mise en place par notre association. Nous les invitons à prendre contact, rapidement, avec notre association.
Nos maisons se fissurent.
Notre patrimoine tombe en ruine, et pour certains sinistrés le leur n’existe déjà plus.
Nous sommes en 2023 et les arrêtés traitent des reconnaissances de 2020/2021.
Le ministre de l’Intérieur a signé, le 24 octobre, une circulaire relative « à la mise en place de référents départementaux, à la gestion des conséquences des catastrophes naturelles et à leur indemnisation ». Futurs interlocuteurs des communes, ils devraient être nommés avant le 30 novembre.
Par Franck Lemarc
Cette circulaire a été publiée dans le Bulletin officiel du ministère de l’Intérieur du 14 novembre. Elle précise les dispositions issues de la loi du 28 décembre 2021 relative à l’indemnisation des catastrophes naturelles.
La loi du 28 décembre 2021
Cette loi, à l’article 2, instaure les référents départementaux à la gestion des catastrophes naturelles, placés auprès des préfets. C’est un acteur important, dans la mesure où son rôle est notamment « d’informer les communes des démarches requises pour déposer une demande de reconnaissance de l’état de catastrophe naturelle, de les conseiller au cours de l’instruction de leur demande et de mobiliser les dispositifs d’aide et d’indemnisation susceptibles d’être engagés après la survenue d’une catastrophe naturelle ou, le cas échéant, après un événement climatique exceptionnel pour lequel une commune n’a pas vu sa demande de reconnaissance de l’état de catastrophe naturelle satisfaite ». Ces référents doivent également servir de courroie de transmission entre les maires, les préfets et les assureurs. Ils jouent un rôle d’information sur « la gestion et la prévention des catastrophes naturelles ». Enfin, ils doivent mettre à la disposition des habitants « des supports de communication (…) afin de garantir une bonne connaissance de la procédure de reconnaissance de l’état de catastrophe naturelle ».
Comme il est rappelé dans la circulaire, cette loi a également modifié certains aspects de la procédure de reconnaissance de l’état de catastrophe naturelle : le délai de dépôt d’une demande de reconnaissance a notamment été porté de 18 à 24 mois – le ministère indique que l’application informatique iCatNat a été modifiée en conséquence depuis le mois de janvier.
Cette réforme a également rendu obligatoire l’information aux communes, par les préfectures, de la parution des arrêtés de reconnaissance de l’état de catastrophe naturelle.
Les autres dispositions de la loi ne sont, pour la plupart, pas encore entrées en application, du fait du retard pris par la parution des décrets.
Le rôle du référent
La circulaire précise surtout le rôle du référent départemental. Il devra, écrivent les services du ministre, « accompagner et conseiller les municipalités dans leurs démarches tout au long de la procédure de reconnaissance de l’état de catastrophe naturelle », depuis le dépôt de la demande jusqu’à la parution de l’arrêté. Il pourra par exemple « organiser des réunions entre les sinistrés, les collectivités locales et les représentants des assureurs afin de présenter les différents dispositifs assurantiels existants », et devra s’assurer que les communes, qui le demandent, comme le permet la loi, sont bien destinataires des rapports d’expertise ayant fondé la décision de reconnaissance (ou de non-reconnaissance).
En revanche, est-il précisé, il ne revient pas aux référents d’intervenir dans le processus d’indemnisation des sinistrés. En cas de litige, ces derniers doivent se tourner vers le Médiateur des assurances.
Les référents doivent également guider les communes et les habitants dans le maquis des aides et des indemnisations qu’elles peuvent possiblement toucher après une catastrophe : dotation de solidarité en faveur des équipements publics non-assurables des collectivités locales et de leurs groupements, dispositifs assurantiels, etc. « Il facilite et cordonne la mobilisation des aides de l’État et des éventuels dispositifs mobilisés à l’initiative des collectivités territoriales».
Enfin, dans le cadre de la politique de prévention, le référent doit « participer au développement de la culture du risque », auprès des communes elles-mêmes mais aussi des habitants, des entreprises et des associations. « Il diffuse une information préventive sur les différents dispositifs d’aide et d’indemnisation mobilisables après la survenue d’une catastrophe naturelle ». Dans ce cadre, le référent devra présenter chaque année, devant la commission départementale des risques majeurs, un rapport bilan sur les suites données aux demandes de reconnaissance dans le département, l’utilisation du fonds Barnier, et « l’évolution de la connaissance de l’exposition des territoires au phénomène de sécheresse-réhydratation des sols ».
Le ministre demande instamment aux préfets de nommer ces référents, dans chaque département, avant le 30 novembre prochain. Il reste à espérer qu’après les nominations, l’information et les contacts seront bien, rapidement, communiqués aux communes.
Cécile et sa famille font face depuis plusieurs années aux conséquences de leur maison qui se fissure un peu plus chaque jour. Elle s’inquiète pour l’hiver.
L’hiver arrive et Cécile et sa famille doivent faire face aux conséquences des fissures sur leur maison à Sablé-sur-Sarthe.
Les fissures s’empirent chaque mois, mais pour être qu’ils puissent être indemnisés et pour pouvoir engager les réparations, la ville doit être reconnue en état de catastrophe naturelle sécheresse.
Ni en 2021, ni en 2022 ça n’a été le cas.
Une importante fissure sur sa cheminée la rend inutilisable cet hiver.
Aucun cheministe ne veut la réparer pour ne pas avoir à engager sa garantie décennale
Cécile
Et l’utiliser serait très dangereux. « De la suie s’échappe par les fissures ainsi que du monoxyde de carbone. »
Deux poêles à pétrole récupérés
Grâce à la Croix Rouge, ils ont pu récupérer deux poêles à pétrole, mais Cécile s’inquiète de la consommation. Une aide d’appoint qui n’a rien d’écologique.
Les politiques ont été nombreux à se déplacer pour constater les conséquences de la sécheresse chez la Sabolienne, mais aucune solution ne se dessine aujourd’hui et l‘hiver vient compliquer les choses.
2 communes reconnues 3 communes non reconnues en état de catastrophe naturelle
Arrêté du 20 septembre 2022 portant reconnaissance de l’état de catastrophe naturelle publié au journal officiel du 12 Octobre 2022
NOR : IOME2226254A
Extrait du Journal officiel
DÉPARTEMENT DE LA SARTHE
ANNEXE I : COMMUNES RECONNUES
Courdemanche et Maisoncelles Mouvements de terrain différentiels consécutifs à la sécheresse et à la réhydratation des sols du 1er juillet 2020 au 30 septembre 2020.
ANNEXE II : COMMUNES NON RECONNUES
La Chartre-sur-le-Loir: Mouvements de terrain différentiels consécutifs à la sécheresse et à la réhydratation des sols du 24 juin2020 au 31 décembre 2020.
Mayet: Mouvements de terrain différentiels consécutifs à la sécheresse et à la réhydratation des sols du 01 avril 2021 au 31 décembre 2021.
Mézières-sur-Ponthouin: Mouvements de terrain différentiels consécutifs à la sécheresse et à la réhydratation des sols du 01 janvier 2021 au 31 décembre 2021.
Procédures :
Les sinistrés des communes reconnues disposent désormais d’un délai de dix jours à compter de la date de parution de l’arrêté au Journal Officiel pour déclarer leur sinistre à leur compagnie d’assurance. Ils sont invités à nous contacter pour les accompagner, en cas de refus d’indemnisation par leur Compagnie d’assurances.
Les maires des communes non reconnues disposent de 2 mois pour formuler des recours gracieux ou auprès du tribunal administratif ! Ils pourront :
a. Se faire accompagner par l’Association des Communes Sarthoises Maisons Fissurées. Cette association a été créée à la demande de notre association. b. Nous contacter pour toutes les informations nécessaires à leur démarche.
Parallèlement, les sinistrés des communes non reconnues, peuvent contester cette décision, en rejoignant la procédure de recours collectif auprès du tribunal administratif de Nantes, mise en place par notre association.
Nous les invitons à prendre contact, rapidement, avec notre association.
Vous avez peut-être aperçu des fissures sur les murs de votre maison. Celles-cipourraient être liées à la sécheresse de ces derniers mois. Plus de 10 millions de maisons seraient exposées en France, d’après le ministère de l’Écologie.
La sécheresse a impacté les agriculteurs, les producteurs mais aussi de nombreux propriétaires ayant leurs maisons construites sur un terrain argileux. « Quand il pleut, l’argile gonfle et lorsqu’il fait sec, l’argile se dessèche. Et en se rétractant, il libère de l’espace dans lequel s’engouffrent les fondations, s’il y en a », explique Mohamed Benyahia, président de l’association Urgences maisons fissurées Sarthe.
Depuis 2020, la loi ELAN rend obligatoire la réalisation d‘études de sol avant la construction de maisons individuelles dans des zones argileuses. « C’est mieux encadré », poursuit Mohamed Benyahia, qui assure que si la loi avait été instaurée avant : « on aurait pu éviter beaucoup de dégâts sur des maisons construites ces dernières décennies. »
Parcours du combattant
Cependant, si vous constatez des fissures sur votre maison et que vous pensez que ces dernières sont liées au phénomène de sécheresse, il faut se rendre à votre mairie et demander la reconnaissance d’état de catastrophe naturelle. Mais trop peu de communes sont reconnues comme tel, déplore le président de l’association. Selon lui, « cette reconnaissance est prononcée par la commission interministérielle, mais on ne sait pas qui y siège, quelles sont les modalités, etc… »
Une fois l’état de catastrophe naturelle reconnu dans votre commune, il faut faire la déclaration à son assurance dans les 10 jours qui suivent maximum. Mais malheureusement, les assurances ne jouent pas toujours le jeu, regrette Mohamed Benyahia : « si on est dans les clous, certaines compagnies d’assurance mandatent des cabinets d’experts, qui viennent sur place avec l’objectif de dire que ce n’est pas de la sécheresse. »
C’est pourquoi l’association conseille de s’entourer d’un expert en bâtiment pour éviter les mauvaises surprises. « Nous ce qu’on veut, c’est que tous les sinistrés demandent à leur compagnie d’assurance de faire une étude de sol. C’est le seul moyen aujourd’hui de déterminer de manière précise, scientifique et indiscutable si l’origine du désordre provient de la sécheresse, ou non », commente le président de Urgences maisons fissurées Sarthe.
Dans la Sarthe, l’association lance actuellement une campagne pour demander à tous les maires où il y a des habitants qui ont des fissures de faire une demande de reconnaissance d’état de catastrophe naturelle pour l’année 2022. Dans le département, plus de 600 maisons fissurées seraient concernées.
Une réunion publique, organisée par l’Association urgence maisons fissurées Sarthe, s’est tenue mardi 6 septembre 2022, à la salle Henri-Barbin, au Mans (Sarthe). Les propriétaires de ces bâtisses ont expliqué que la sécheresse avait accentué les craquelures de leurs maisons.
Mohamed Benyahia, président de l’Association urgence maisons fissurées Sarthe, a écouté longuement les remarques et les témoignages des propriétaires de maisons fissurées. | OUEST-FRANCE
Les fissures se sont agrandiesde plusieurs centimètres cet été, soupire une habitante de Coulaines. Elle témoigne, comme plusieurs autres, lors de la réunion publique organisée par l’Association urgence maisons fissurées Sarthe (AUMF), mardi 6 septembre 2022, à la salle Henri-Barbin,au Mans(Sarthe). Plus de 75 personnes écoutent avec attention les faits relatés : tous ou presque sont propriétaires de maisons fissurées.
Une deuxième réunion publique à La Flèche
Au Mans, 109 sinistrés ont été recensés. La sécheresse de cet été a fortement aggravé les fissures déjà existantes, explique Mohamed Benyahia, président de l’AUMF. Si on n’obtient pas la reconnaissance en état de catastrophe naturelle alors qu’on a subi des chaleurs exceptionnelles, c’est vraiment aberrant.
Il s’est montré rassurant, donnant des conseils aux sinistrés, qu’ils habitent dans des communes reconnues ou non. La dernière date pour faire un recours, c’est le 26 septembre ! Une deuxième réunion publique sera organisée mercredi 14 septembre, à La Flèche, salle Printania, à 18 h.
Des maisons fissurées à cause de la sécheresse : c’est le calvaire auquel sont confrontés de plus en plus d’habitants, face au manque d’eau et aux canicules à répétition.
Le manque d’eau dû à la sécheresse et les vagues de fortes chaleurs n’ont pas qu’un impact sur l’environnement et les organismes vivants. Les habitations, elles-aussi, souffrent des fortes températures.
Pour preuve, les fissures qui apparaissent dans les murs de plus en plus de maisons depuis les épisodes de sécheresse des dernières années. Une situation dramatique pour les propriétaires qui peinent à se faire indemniser par les assurances.
Pourtant, le phénomène est loin d’être isolé. Plus de dix millions d’habitations pourraient être concernées en France.
Les « premières victimes » de la canicule et de la sécheresse
« Nous sommes les premières victimes de la sécheresse. Les maisons fissurées sont moins médiatiques que des tornades, les inondations ou le feu, mais on a aussi besoin d’être assistés et aidés », déclarait en juin 2022 à notre rédaction Les Nouvelles de Sablé Mohamed Benyahia, président de l’association Urgence maisons fissurées Sarthe.
Depuis 2018, la sécheresse que connaît le département de la Sarthe a provoqué des fissures dans au moins 200 habitations, dont celle de Mohamed, qui menace de s’effondrer. Il raconte à actu.fr :
Ça a commencé avec une fissure, en septembre 2018. Malgré la pose d’étais, la maison aujourd’hui est un danger. On l’entend craquer, je n’arrive plus à dormir, et c’est de pire en pire car c’est toute la structure qui est endommagée.
Mohamed Benyahia Président de l’association Urgence maisons fissurées Sarthe
Principale cause de l’apparition de ce genre de fissures : le réchauffement climatique et ses conséquences au niveau des sols argileux, qui « possèdent la propriété de voir leur consistance se modifier en fonction de leur teneur en eau », explique Géorisques, le portail gouvernemental spécialisé dans les risques.
C’est le phénomène de retrait-gonflement des sols argileux : « En contexte humide, un sol argileux se présente comme souple et malléable, tandis que ce même sol desséché sera dur et cassant », précise le site.
Ainsi, lorsque la teneur en eau augmente dans un sol argileux, on assiste à une augmentation du volume de ce sol, on parle alors de « gonflement des argiles ». Au contraire, une baisse de la teneur en eau provoquera un phénomène inverse de rétractation ou « retrait des argiles »
Selon le ministère de l’Écologie, 10,4 millions de maisons individuelles sont « potentiellement très exposées » à ce risque de retrait-gonflement des argiles.
« Amplifiés par les épisodes de sécheresse », ces mouvements de sol « constituent un risque majeur en raison des dégâts matériels qu’ils provoquent », affirmait en 2021 le ministère de l’Ecologie, lors de la mise à jour de la carte de France des zones à risque. Et ce nombre pourrait continuer à augmenter en raison du réchauffement climatique et du risque de canicules et de sécheresse à répétition.
C’est le cas dans le sud-Sarthe par exemple, dans la commune de Saint-Georges-de-la-Couée. Là-bas, une « veine argileuse » qui s’étend sur le territoire provoque des fissures dans les maisons avec la sécheresse, expliquait le maire Sylvain Bidier, en 2021, à notre rédaction du Petit Courrier.
« Avec les sécheresses qui s’accentuent ces dernières années en raison du réchauffement climatique, on observe à certains endroits une déformation des fenêtres et des huisseries, des fissures, un impact sur le sol des maisons qui tend à s’affaisser », expliquait l’élu.
Et cette année, la sécheresse historique risque de ne rien arranger, au contraire.
Que ce soit dans la Sarthe, en Vendée, en Seine-et-Marne, dans le Nord ou près de Toulouse, les propriétaires de maisons fissurées dressent tous le même constat : bon courage pour se faire indemniser, et dans la plupart des cas, il faut engager un véritable bras de fer.
Déjà, avant que les assurances ne rentrent en jeu en vue d’une éventuelle indemnisation, il faut que la commune soit reconnue en état de catastrophe naturelle.
Pour cela, il faut que la commune saisisse la préfecture, qui doit elle-même saisir le ministère de l’Intérieur, détaille notre rédaction Le Journal des Sables, aux Sables d’Olonne (Vendée), où des habitations sont touchées. Puis, écrivait-elle début août, si un décret ministériel inscrit au Journal officiel déclare l’état de catastrophe naturelle, le sinistré, une fois averti du décret, dispose alors de 10 jours pour avertir son assurance de la déclaration de sinistre.
En moyenne, « la procédure de reconnaissance prend dix mois », selon le calcul de Mohamed Benyahia. Commence ainsi, bien souvent, une bataille avec les assurances, comme l’expliquait début août, à notre rédaction La Marne, l’association Les Oubliés de la canicule, où de nombreuses habitations sont confrontées au phénomène en Seine-et-Marne.
L’obtention de ce décret de catastrophe naturelle pour un territoire ne constitue pas une fin en soi et ne garantit pas que les assurances acceptent d’indemniser les sinistrés à hauteur de leurs dommages et de la remise de leur bien en l’état, de manière pérenne, tel qu’il se trouvait avant ce phénomène de catastrophe naturelle reconnu. Même une fois reconnu en catastrophe naturelle, il est très difficile d’être indemnisé, ce n’est pas automatique et 90 % des sinistrés se battent des années.
Association Les oubliés de la canicule
Repenser la procédure
En attendant, la situation évidemment se détériore dans les habitations touchées, faute de réparations engagées. Avec la crainte pour les sinistrés, qu’un jour, leur maison ne leur tombe sur la tête. Face à cette situation, Mohamed Benyahia dénonce une opacité autour de la reconnaissance de l’état de catastrophe naturelle.
Mohamed Benyahia fustige des critères pas pertinents et pas adaptés à la situation de ces dernières années, associés à un manque de transparence dans la prise de décision de la commission interministérielle. Le sinistré milite pour un changement méthode.
Il faudrait qu’à chaque apparition d’une fissure, une étude des sols soit réalisée et reconnue par les assurances. Ce serait le moyen le plus simple et le plus rapide de déterminer si cette fissure est due à la sécheresse.
Mohamed Benyahia Président de l’association Urgence maisons fissurées Sarthe.
Une façon de parer à l’urgence de la situation, alors que de 2020 à 2050, la facture des indemnisations dues à la sécheresse est estimée à 43 milliards d’euros selon la Fédération française de l’assurance. Sauf que tant que les propriétaires ne sont pas indemnisés et les travaux et réparations pas réalisés, « on attend et on pleure ».
Depuis 2015, les périodes de sécheresse s’enchaînent et affectent les sols argileux. Plus de 10 millions de maisons en France sont sur des zones à risque et peuvent se fissurer. Un enjeu à plusieurs dizaines de milliards d’euros pour les assurances.
Daphné Gastaldi (We Report) 12 août 2022 à 15h55
La Penne-sur-l’Ouvèze (Drôme), Montpellier (Hérault).– Même passé midi, en pleine canicule, des grappes de cyclistes pédalent à tout va en direction du mont Ventoux. Dans les villages des Baronnies provençales, on les retrouve assoiffés dans les bistrots bordés de platanes. Ce jour-là, au tout début de l’été, la Drôme est en alerte orange. Depuis des semaines, un vent sec balaye le domaine de Frédéric Alaïmo, 60 hectares de cultures, à La Penne-sur-l’Ouvèze. « Je fais du raisin de table mais les feuilles commencent à jaunir. Nos oliviers souffrent », montre le propriétaire.
Sous les pieds, la terre a viré au gris et se fissure de jour en jour. Sa maison aussi.
Comme des éponges, les sols argileux se rétractent en période de sécheresse et regonflent avec les pluies. La succession et l’intensité de ces phénomènes peuvent créer des mouvements de terrain, des tassements. La bâtisse de Frédéric Alaïmo fait partie des 10,4 millions de maisons moyennement ou fortement exposées à ce phénomène de retrait-gonflement des argiles (RGA), soit 54 % des maisons en France, selon les données du ministère de la transition écologique. Une victime de plus des risques climatiques.
« J’ai connu la sécheresse de 2003. C’était une première alerte », se remémore-t-il, derrière ses lunettes rondes. Et puis, il y a eu 2019, la pire année pour la commune, reconnue comme catastrophe naturelle en 2020. « Parfois, je me demande ce que je suis venu faire ici », soupire-t-il. Depuis trois ans, cet homme de 60 ans se bat contre son assurance pour faire réparer sa maison, à l’entrée du domaine.
Comme un bris de glace sur un pare-brise, les fissures se sont étendues à l’étage, aux embrasures des fenêtres. Le carrelage se fend, la porte de la véranda s’ouvre péniblement. Frédéric Alaïmo a fini par déménager chez sa compagne en catastrophe. Depuis, les habits sont restés dans les placards, les photos de famille plaquées aux murs.Le 8 décembre 2020, le Drômois a pu déclarer ce sinistre. « J’ai une perte en capital importante », explique-t-il. « Je n’avais jamais vu ça, la maison est disloquée », écrit un représentant de son assurance dans un mail daté du 31 mars 2021. Il reconnaît avoir eu « très peur de visiter cette maison sinistrée ». En juin 2021, le maire, Jérôme Bompard, 50 ans et entrepreneur en travaux publics, atteste que la maison de Frédéric Alaïmo est « devenue totalement inhabitable depuis la sécheresse de 2019 ».
Le dossier paraissait simple mais depuis rien n’a bougé : les deux experts de l’assurance ne sont pas d’accord sur les zones touchées. Plus encore, l’assurance estime que les fissures ont commencé avant la sécheresse de 2019. « Le problème, c’est qu’on a deux sons de cloche des experts envoyés par la même assurance », s’emporte Frédéric. Il a dû payer de sa poche plus de cinq mille euros pour mener des investigations dans le sol et prouver la présence d’argile sensible à ces aléas climatiques. Il doit aussi payer un expert d’assuré pour régler ce conflit avec l’assurance.
L’état de catastrophe naturelle difficile à obtenir
De maison en maison, Franck Salaun, ingénieur et associé du cabinet Altaïs, parcourt la France, de la Drôme au Jura, au gré des arrêtés de catastrophe naturelle. Il intervient pour déterminer la pathologie du bâtiment. « Quand il y a des fractures, un médecin fait un diagnostic, un scanner ou un IRM. Nous, c’est pareil avec les investigations techniques », explique-t-il. « Dans le cas de M. Alaïmo, si l’assureur s’entête à ne pas ouvrir la garantie, ça ira au judiciaire », se prépare-t-il.
Selon la carte d’exposition du Bureau de recherches géologiques et minières (BRGM), la zone présente un risque fort. La rivière provençale l’Ouvèze est au plus bas. « On a des périodes de sécheresse depuis 2016, raconte le maire. On a déjà eu des refus pour les faire reconnaître comme catastrophes naturelles. » Selon le rapport de la Cour des comptes de février 2022, une commune sur deux n’a pas réussi à faire reconnaître l’état de catastrophe naturelle ces neuf dernières années. En 2019, le maire a pris le taureau par les cornes. « On a envoyé un dossier pour six maisons sinistrées à la préfecture. Tout le monde se bat avec les assurances maintenant », raconte-t-il. Deux kilomètres plus loin, un autre villageois va bientôt devoir quitter sa maison. « Les façades sont en train de tomber, la baie vitrée ne ferme plus, la dalle est descendue de 4 à 5 centimètres », énumère Eric D., fonctionnaire de 61 ans. Il espère que la sécheresse en 2022 n’aggravera pas les dégâts. Cette fois-ci, l’assurance a accepté la prise en charge. L’installation de micropieux sous la maison, solution pérenne pour renforcer les fondations en profondeur, devrait durer entre six mois et un an. « Le relogement pour la famille, c’est à nos frais. Le gardiennage des meubles aussi », s’inquiète-t-il.
48 % du territoire exposé
Tout le pays est concerné, les villes aussi. L’Occitanie fait partie des régions historiquement les plus exposées, avec l’Île-de-France, la PACA ou la Nouvelle Aquitaine. À Montpellier, Philippe subit le même phénomène. « J’ai acheté une maison dans Montpellier en 2001, près d’une rivière, le Lez », raconte-t-il. En 2019, la ville a vécu une sécheresse reconnue comme catastrophe naturelle. « Des morceaux de plafond sont tombés et il y a des fissures nettes sur les cloisons », poursuit-il, encore stupéfait. Après trois ans d’attente, ce cadre technique de 62 ans vient d’obtenir le feu vert de l’assurance pour lancer les travaux. Le devis s’élève à plus de 150 000 euros.
« On remarque que certains secteurs sont plus touchés que d’autres, mais ça reste très localisé,explique Jeremy Chatal, ingénieur du bureau d’études Determinant, à Nîmes.Dans l’Hérault, à Villeneuve-lès-Maguelone, il y a un quartier où j’ai fait une quinzaine de maisons. Dans mon secteur, c’est généralisé à l’arc méditerranéen, les Pyrénées orientales, le Gard, l’Hérault, le Vaucluse et les Bouches-du-Rhône. Mais nos collègues dans l’Ain et le Jura aussi sont débordés. »
En France, 48 % du territoire a une exposition moyenne et forte au RGA. « Quand on regarde la carte d’exposition, on a un grand quart sud-ouest touché et tout l’arc méditerranéen qui va ensuite contourner le Massif central par le sud et remonter une partie de la vallée du Rhône. Depuis 2015-2016, ça se décale vers le Nord-Est. Des régions relativement épargnées jusqu’à présent sont touchées maintenant », confirme Sébastien Gourdier, géotechnicien du BRGM. « Les grandes villes du Sud-Ouest, comme Toulouse, sont exposées et ont dû mettre en place des plans de prévention des risques », poursuit-il. Depuis 2018 seulement, la loi Elan établit des règles de construction sur les zones à risque, en imposant une étude de sol pour les nouvelles habitations.
Parmi les témoignages recueillis, ce ne sont que des récits de vie en pause, plombée par l’endettement ; de boule au ventre à chaque nouvelle fissure ; de dépressions lorsque l’on vit dans une maison où les pièces sont condamnées au fur et à mesure. Les associations de victimes croulent sous les demandes. Les Oubliés de la canicule ne compte même plus son nombre d’adhérents. Trente mille à la louche.Leur président a écrit au président Emmanuel Macron, en pleine campagne présidentielle, pour exiger de meilleures conditions d’indemnisation des sinistrés.
Un coût estimé à 43 milliards d’euros d’ici 2050
Le régime de catastrophe naturelle est un système d’assurance dit « mixte », mis en œuvre par les sociétés d’assurance et les pouvoirs publics. « On demande que les assureurs jouent le jeu et que les sinistrés puissent avoir des réparations pérennes », martèle Hélène Niktas, référente de l’association dans l’Ain. Elle-même a subi un sinistre dans sa maison de Meillonnas, lors de la sécheresse de 2018. « L’assurance a rétropédalé quand elle a vu le devis de micropieux. Elle a proposé de l’agrafage, mais ce n’est que le cachet d’aspirine qui fait tomber la fièvre, ça ne soigne pas. » Son dossier se réglera au niveau judiciaire.
À leurs côtés, Me Gwenahel Thirel, avocat aux barreaux de Rouen et Montpellier, en a fait sa spécialité. « J’ai lu les 1 700 décisions de jurisprudence », s’amuse-t-il à rappeler. « Quand j’ai commencé, il y a huit ans, il y avait des arrêtés de catastrophe naturelle pour la sécheresse tous les trois ans. Aujourd’hui, c’est quasiment tous les ans », poursuit-il d’un ton plus grave. Il s’emporte contre l’opacité des assurances qui ne communiquent pas systématiquement les rapports ou les études de sol. « Sur 2018, on a eu un nombre de refus colossal par des experts d’assurance, avec des motifs fallacieux comme la présence de végétaux à proximité », tonne-t-il. « Ce que l’on craint, c’est que les assurances réduisent les indemnités pour les dégâts sur les maisons. Il y en a tellement… »,souffle Daniela Rodier, présidente de l’Association gardoise d’assistance aux sinistrés des sécheresses, vers Nîmes. « Cette année, je suis débordée avec les sinistres de 2021 ». Le coût des sinistres liés à la sécheresse devrait passer à 43 milliards d’euros en cumulé sur les trente prochaines années, soit trois fois plus que sur la période 1989-2019, selon les projections à horizon 2050 de France Assureurs.
« La sécheresse est un aléa climatique qui pèse beaucoup dans le régime catastrophe naturelle et qui risque de peser plus à l’avenir, notamment en raison du changement climatique » rajoute Franck Le Vallois, directeur général de France Assureurs, interrogé par Mediapart. « On pense que la sécheresse doit rester dans le régime de catastrophe naturelle », rassure-t-il, pour couper court au débat.
Une réforme est amorcée depuis la loi du 28 décembre 2021 relative à l’indemnisation des catastrophes naturelles. La fédération des assurances est toujours en discussion avec Bercy pour intégrer les frais de relogement des victimes dans ce régime. Franck Le Vallois prêche pour mettre en place plus d’innovations. « Il faudrait accélérer les expérimentations. Il y en a qui permettent de maintenir l’hydrométrie dans le sol, en l’humidifiant pour éviter la rétractation des sols ». Comprendre : remettre de l’eau sous la terre.
Selon l’association « Urgence Maisons Fissurées Sarthe », neuf communes supplémentaires auraient du être reconnues en état de catastrophe naturelle. Pour tenter d’obtenir ce classement de la part de l’Etat, elle lance un recours devant le tribunal administratif.
Place à la justice dans l’épineux dossier des maisons fissurées en Sarthe. De nombreux logements, construits sur des sols argileux, se dégradent à cause des sécheresse à répétition. Plusieurs arrêtés préfectoraux ont reconnu l’état de catastrophe naturelle, ce qui permet aux habitants concernés de toucher des aides pour les travaux de réparation, souvent importants, qu’ils doivent entreprendre. Toutefois, neuf communes – qui auraient pu y prétendre- ne figurent pas dans la liste, déplore l’association « Urgence Maisons Fissurées Sarthe » qui, cette fois, lance une action devant le tribunal administratif.
Un recours collectif
« Nous attendons depuis deux ans qu’une procédure judiciaire soit engagée par les communes. Ce n’est pas fait« , déplore Mohamed Benyahia, son président. « C’est pourquoi nous lançonsce recours collectif. L’ensemble des sinistrés des communes concernées peuvent le rejoindre« , explique-t-il. Sur le fond, l’association demande « l’annulation de lanon-reconnaissance de l’arrêté du 14 janvier 2022 parce qu’il est basé sur des critères complètement farfelus, stupides ».
« Une sorte d’arnaque »
Cette décision a, de fait, du mal à passer. « Pour nous, c’est une sorte d’arnaque. Nous avons réalisé des études de sol, maison par maison, qui montrent que la sécheresse a bien touché les fondations des logements« , rappelle Mohamed Benyahia, président de l’association « Urgence Maisons Fissurées Sarthe ». « Les personnes qui veulent rejoindre ce recours ont jusqu’au lundi 14 mars pour se faire connaître« , précise-t-il.
Les neuf communes en question sont : La Chartre-sur-le-Loir, Coulans-sur-Gée, Mayet, Neuville-sur-Sarthe, Saint-Mars-d’Outillé, Sceaux-sur-Huisne, Soulitré, Trangé et Viré-en-Champagne.
Un arrêté préfectoral publié samedi 12 février place trois nouvelles communes sarthoises en état de catastrophe naturelle après l’épisode de sécheresse à l’été 2020 : Boéssé-le-Sec, Saint-Calais et Saint-Martin-des-Monts.
Trois nouvelles communes sarthoises ont été reconnues samedi en état de catastrophe naturelle, après la sécheresse à l’été 2020, qui a entrainé des mouvements de terrain et parfois des fissures dans certaines habitations : Boessé-le-Sec, Saint-Calais et Saint-Martin-des-Monts portent à 31 le nombre de villes et villages sarthois touchés par le phénomène.
L’état de catastrophe naturelle permet ensuite aux maires et habitants des communes concernées d’être mieux et plus rapidement pris en charge par leur assurance.
C’est le cinquième arrêté publié en ce sens, précise l’association Urgence Maisons fissurées dans un communiqué.