Maisons fissurées : « Le gouvernement doit enfin s’occuper de ce problème qui concerne une maison sur deux »

Mohamed Benyahia, président de l’association Urgence maisons fissurées Sarthe, invité de France Bleu Maine ce lundi 10 avril 2023, appelle le gouvernement à enfin soutenir les propriétaires et le projet de loi porté par l’écologiste Sandrine Rousseau.
Maison fissurée à Aize © Radio France – Gaëlle Fontenit

De

C’est un problème qui concerne plus de 10 millions de maisons en France. Ces habitations, construites sur des sols argileux, sont exposées à un fort risque de fissures lors des épisodes de sécheresse du fait du phénomène « retrait gonflement des argiles », phénomène accentué par le réchauffement climatique.

Depuis plusieurs années, les propriétaires se battent pour être indemnisés. Et ils viennent d’obtenir une avancée importante : un projet de loi porté par l’écologiste Sandrine Rousseau vient d’être voté par les députés. Si elle est adoptée, elle simplifierait la procédure pour l’obtention de la reconnaissance de l’état de catastrophe naturelle et l’indemnisation.

Le texte voté en première lecture à l’Assemblée nationale doit maintenant passer au sénat. Mais le gouvernement ne le soutient pas arguant que cela va trop couter trop cher aux compagnies d’assurance. Cela va « allonger les délais d’indemnisation » et « augmenter les primes d’assurance, au détriment des assurés » met en garde la ministre chargée des PME, Olivia Grégoire.

1.500 à 2.000 maisons fissurées en Sarthe

Une position qui indigne Mohamed Benyahia, le président de l’association Urgence maison fissurées Sarthe : « Nous invitons le gouvernement à aller visiter des maisons fissurées, à regarder les familles avec des enfants qui pleurent la nuit, à regarder où vivent ces gens-là parce que le gouvernement doit aussi prendre en compte la situation réelle. Cela fait plus de quatre ans que l’on lutte et que l’on parle à un mur. Il faut arrêter de se cacher derrière des aspects techniques et la langue de bois« .

Avec une maison sur deux concernées en France par le risque de fissures, l’enjeu financier est considérable, mais Mohamed Benyahia estime que « quoi qu’il en coute, le gouvernement doit prendre le problème à bras le corps« . Actuellement, selon Urgence maisons fissurées Sarthe, il y aurait entre 1.500 et 2.000 habitations fissurées dans le département. Ce nombre pourrait fortement augmenter dans les prochains mois, affirme Mohamed Benyahia : « avec la sécheresse de cet hiver, on risque d’avoir de gros dégâts. 2023 va être très difficile« .

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Maisons fissurées : adopté par les députés, un texte de loi pourrait permettre aux sinistrés une meilleure indemnisation

D’importantes fissures ont fait leur apparition dans cette maison de Sargé-lès-le-Mans (Sarthe). • © Carine Mordrelle / France télévisions

Publié le 10/04/2023 à 19h35

Écrit par Valentin Pasquier et Robin Spiquel

Construites sur des sols argileux, plus de 10 millions d’habitations sont potentiellement menacées par des fissures en France. Un texte adopté le 6 avril par les députés vise à modifier les critères de reconnaissance de l’état de catastrophe naturelle. Reportage chez des sinistrés à Sargé-lès-le-Mans en Sarthe.

Depuis trois ans, la famille Marchand vit un calvaire. La maison de ces Sarthois, construite à Sargé-lès-le-Mans sur un sol argileux, se fissure de partout.  » Là, c’était vraiment un trait, un écartement, au mois de mai quand l’huissier de justice s’est déplacé. C’est au retour de vacances au mois d’août qu’on a remarqué qu’on pouvait passer nos doigts dans les fissures.« 

Un « RGA », soit un retrait-gonflement du sol argileux, est à l’origine de ce sinistre. Hind et son mari ont dû apprendre à vivre avec.  » Toutes les périodes sont problématiques. Autant les saisons pluviales, car on a des infiltrations d’eau, que les saisons estivales, à cause des bêtes du jardin qui viennent jusque dans la maison.« 

On recense près de 2 000 sinistres de ce type, rien que dans le département de la Sarthe et selon les estimations plus basses. Mais les indemnisations se font rares, car peu de communes sont reconnues en état de catastrophe naturelle.

Ne plus devoir prouver la catastrophe

Une proposition de loi écologiste prévoit d’en simplifier la mise en œuvre, mais aussi d’inverser la charge de la preuve. « Ce n’est pas à l’assuré de prouver qu’il est victime d’une catastrophe naturelle, d’une sécheresse. C’est à l’assureur de prouver le contraire et à financer ces études de sol qui coûtent quand même assez cher. C’est entre 3 000 et 5 000 euros, quand même ! » soutient Mohamed Benyahia, le président de l’association Urgence maisons fissurées 72.

Certains députés de la majorité jugent cette mesure dangereuse : ils craignent une explosion des primes d’assurances et des délais d’indemnisation. Pour les défenseurs du texte tels Elise Leboucher, députée (LFI) de la Sarthe, c’est à l’État de s’engager.

« C’est en effet une charge supplémentaire, mais c’est la responsabilité de l’État. Les sinistrés n’ont pas à payer les conséquences du dérèglement climatique, juge l’élue de gauche. Je rappelle que les assurances ont fait des records de bénéfices en 2022, donc il y a des moyens de financer ça. L’État doit prendre ses responsabilités« 

En attendant le passage du texte au sénat, l’association Urgence maisons fissurées demande à tous les sinistrés et les maires de leur transmettre leurs refus d’indemnisation pour préparer la bataille judiciaire à venir.

Sécheresse : les propriétaires de maisons fissurées, symboles malgré eux d’un système d’assurance submergé par le changement climatique

Marie-Adélaïde Scigacz France Télévisions

Publié le 08/04/2023 07:05 Mis à jour le 08/04/2023 08:46

En France, 54% des maisons individuelles sont construites dans des zones d’exposition moyenne et forte au phénomène de retrait-gonflement argileux (RGA). (ASTRID AMADIEU / FRANCEINFO.FR)
Les débats à l’Assemblée nationale, jeudi, ont mis en lumière les failles d’un système assurantiel incapable de protéger tous les citoyens face aux effets de la sécheresse.

Des maisons qui bougent, craquent et se désossent, jusqu’à devenir parfois inhabitables, irréparables et invendables. « Ce n’est pas pour rien que nous nous appelons ‘Association urgence maisons fissurées’: le mot ‘urgence’ estimportant », insiste Mohamed Benyahia. Au lendemain de l’adoption par l’Assemblée nationale, jeudi 6 avril, d’une proposition de loi visant à mieux indemniser les propriétaires frappés par le phénomène de retrait-gonflement des sols argileux (RGA), le président de l’antenne sarthoise d’un collectif de sinistrés victimes de cette calamité liée aux périodes de sécheresse se dit « très heureux qu’une étape importante [ait] été franchie. » « Maintenant, il faut que le texte soit vite discuté au Sénat, que les décrets d’application soient signés rapidement, que les choses se mettent en mouvement tout de suite ! »

En France, plus de la moitié (54%) des maisons individuelles sont situées en zone d’exposition moyenne ou forte au phénomène de RGA. Soit 10,5 millions de maisons sur un total de 19,4 millions, d’après les chiffres du ministère de la Transition écologique. Derrière ce sigle se cache un phénomène mécanique et géologique relativement simple. Les sols argileux sur lesquels les bâtisses touchées sont construites sont très sensibles à l’eau : ils se gonflent quand il pleut et se rétractent lors des périodes de sécheresse. L’alternance entre les périodes humides et sèches entraîne ainsi des mouvements successifs du sol qui fragilisent les fondations des maisons, finissent par les faire bouger, et provoquent des fissures visibles dans les constructions.

Le texte porté par la députée écologiste Sandrine Rousseau ambitionne de faciliter les procédures d’indemnisation pour des milliers de petits propriétaires qui luttent pour entreprendre des travaux indispensables pour continuer à vivre dans leur domicile. Mais le parcours du combattant et loin d’être terminé pour les sinistrés.

De plus en plus de sinistrés, de moins en moins de reconnaissance

Un pan de mur qui tient sur des étais, une faille qui serpente « en escalier » sur la façade. Ici, la faïence de la cuisine « a pété en une après-midi », là, une épaisse fissure traverse de long en large un salon chic et moderne, au-dessus de la télévision. « Ah moi, j’ai une déco un peu spéciale », plaisante une propriétaire. Un doux mardi soir d’avril dans une salle communale de Mézières-sur-Ponthouin (Sarthe), les sinistrés des communes alentour échangent photos, anecdotes et conseils. « Surtout, si vous découvrez une fissure, ne vous tournez pas vers votre assurance. Contactez immédiatement la mairie », martèle Mohamed Benyahia. C’est une particularité de ce sinistre : seuls les propriétaires de maisons fissurées qui résident sur une commune déclarée en état de catastrophe naturelle « sécheresse » peuvent prétendre à une indemnisation, via le régime de garantie « Cat-Nat ». Une reconnaissance refusée jusqu’alors à Mézières-sur-Ponthouin et à plusieurs de ses voisines.

Selon la Caisse centrale de réassurance, environ 4 000 maisons fissurées échappent à l’indemnisation chaque année, faute de correspondre aux critères. Une étude de l’association Mission risques naturels (document PDF), estime leur nombre total à 300 000. Pour Véronique Portier, sinistrée bien décidée à combattre « une vraie injustice », cela se traduit par un devis bloqué dans un classeur, faute de pouvoir débourser les 100 000 euros que coûterait le sauvetage de sa maison, construite au début des années 1990.

Si la proposition de loi adoptée jeudi achève sans encombre son parcours législatif, Véronique Portier et les onze autres sinistrés recensés par la mairie pourraient bien sortir de l’impasse : l’article 1er du texte prévoit de revoir les critères d’attribution de la garantie « Cat-Nat », ouvrant la voie au dédommagement des sinistrés victimes de ce que Sandrine Rousseau et la députée Renaissance Sandra Marsaud ont qualifié dans un rapport commun (document PDF) de « déni d’indemnisation ».

Pour Mohamed Benyahia, cette mesure seule pourrait venir à bout de « la source de tous nos problèmes« , à savoir une circulaire de 2019 (document PDF) qui a fait évoluer les critères à remplir par les communes pour pouvoir être déclarées en état de catastrophe naturelle « sécheresse ». Le président de l’association des sinistrés du département, autrefois prof de maths, la démonte devant ses élèves d’un soir, à la craie, sur un tableau noir. Indicateurs, surfaces étudiées, dates retenues, probabilité de sinistres à venir… Il dézingue « des critères inadaptés ». « En tant que sinistré, on est tout le temps obligé de naviguer entre les entourloupes, de se pencher sur les chiffres… Comme si tout était fait pour exclure le maximum de gens », poursuit-il.

Les chiffres semblent lui donner raison. Si, sur la période 2011‑2021, environ 53% des communes ayant réclamé à l’Etat la reconnaissance de l’état de catastrophe naturelle pour cause de sécheresse ont obtenu gain de cause, ce taux de reconnaissance a dégringolé à 13,3% en 2021. Avant la publication de la circulaire de 2019 décriée par Mohamed Benyahia, il avait culminé à environ 69% en 2017 et 2018, d’après les chiffres obtenus par les Sandrine Rousseau et Sandra Marsaud dans leur rapport.

D’où sa prudence : « la loi garantirait un certain nombre d’acquis, mais le gouvernement a la main sur le réglementaire et donc la possibilité de rédiger des formules ambiguës, avec plusieurs interprétations, encore au détriment des sinistrés », prévient-il. Au banc du gouvernement, le ministre chargé de la Transition numérique, Jean-Noël Barrot, a rappelé jeudi qu’une circulaire à venir permettrait « d’élargir de 20% le nombre » de victimes indemnisées. Pour Mohammed Benyahia, ce serait encore « très insuffisant pour répondre à la catastrophe inédite de l’été 2022 et des étés à venir ».

Un régime à l’épreuve du réchauffement climatique

Car le réchauffement climatique et ses conséquences mettent déjà le régime « Cat-Nat » à rude épreuve. Selon une étude de la fédération des assureurs, la sécheresse a coûté 16 milliards d’euros entre 1989 et 2021 et l’addition pourrait grimper à 43 milliards pour la période 2020-2050. Les dégâts aux bâtiments provoqués par les épisodes observés en France l’été dernier devraient coûter entre 1,6 et 2,4 milliards d’euros aux assureurs, classant 2022 en tête des années les plus coûteuses pour ce type d’événements, devant 2003 et ses 2,12 milliards d’euros pompés par la sécheresse. « Et qui sait ce que réserve l’année 2023, alors qu’on sort d’une sécheresse hivernale qui bat tous les records ? », s’interroge Mohamed Benyahia.

Moins spectaculaire que les inondations qui dévastent des villes entières ou les tempêtes qui emportent les toitures, le RGA impose de repenser au plus vite le fonctionnement du régime de catastrophe naturelle. « Malgré la mauvaise prise en charge des sinistres, à la fois quantitativement et qualitativement, les dépenses liées à la sécheresse sont en forte augmentation depuis 2016. Les ressources du régime ‘Cat-Nat’ ne permettent plus de faire face à la hausse de la sinistralité, ce qui pourrait aboutir à une intervention récurrente de l’Etat qui marquerait l’échec du régime ‘Cat-Nat' », écrivent les députées Sandrine Rousseau et Sandra Marsaud dans leur rapport.

Un autre rapport (document PDF), signé de la sénatrice Les Républicains Christine Lavarde, analyse des pistes de réformes, avant de conclure : « Je dois reconnaître ma frustration, car je n’ai pas trouvé de solution optimale pour garantir la soutenabilité dans la durée du régime ‘Cat-Nat’. » Quant au gouvernement, représenté jeudi dans l’hémicycle par Jean-Noël Barrot, il reconnaît un régime « perfectible ». « Deux décrets d’application en Conseil d’Etat sont en ce moment en préparation » pour améliorer la situation, a assuré le ministre.

L’arbre qui cache la forêt

Mohamed Benyahia a fait construire sa maison en 2005. « En 2019, l’expert m’a dit qu’il fallait que je déménage, que je quitte les lieux », confie-t-il. S’il ne souhaite pas s’étendre sur son cas personnel, il illustre malgré lui l’absence de solution apportée à ces premières vagues de sinistrés du RGA. En se promenant dans les coquettes rues de Mézières-sur-Ponthoin, Véronique Portier ne quitte pas les façades des yeux. « Celle-ci n’était pas là la dernière fois », s’exclame-t-elle, en sortant son téléphone, « pour documenter l’évolution des fissures ». Cet autre bâtiment, strié des fenêtres au toit, comme autour de la porte d’entrée, « a été refait il y a 7 ans », poursuit-elle. Même le bureau de poste, la boulangerie et le bar tabac y passent.

En face de chez elle, elle scrute avec angoisse la construction d’un petit lotissement. En vertu de la loi Elan, adoptée en 2018, un diagnostic des sols a été réalisé avant le début du chantier et les fondations renforcées par cinq rangées de parpaings. Si les futurs occupants peuvent espérer échapper au sort de leur voisine, personne ne semble tout à fait prêt à affronter les difficultés qui s’annoncent avec l’explosion des cas de maisons RGA, regrette la géographe Magali Reghezza, spécialiste de l’adaptation au changement climatique. « La question de l’indemnisation, c’est un peu le premier problème qui apparaît, l’arbre qui cache la forêt », relève-t-elle. Par la défaillance du système aujourd’hui dénoncé par les victimes, le sujet questionne la résilience de l’Etat face à des sinistres d’une ampleur telle qu’ils ne peuvent être supportés par les acteurs privés de l’assurance, à moins d’exclure encore davantage les plus vulnérables, explique la géographe, membre du Haut Conseil pour le climat.

« Derrière cette question du RGA, ce sont des pertes énormes pour des gens et donc le risque d’une paupérisation de tout un pan de la société, sans compter les risques psychologiques associés qui vont aussi peser sur les finances publiques », poursuit l’experte. Car les problématiques soulevées par ces sinistres sont immenses : relogement, destruction des maisons inhabitables, dépollution des sites, recyclage des matériaux, déplacement des populations, des activités… Tout cela, sans compter les impacts du RGA sur les communes quand les routes, les bâtiments publics, les canalisations et les lignes de trains seront touchés à leur tour. « C’est vertigineux en réalité », concède Magali Reghezza. Les réponses des pouvoirs publics, « toujours dans une logique réactive », ne sont pas « dimensionnées à la crise », poursuit-elle. Les sinistrés le diront tous : une petite fissure peut présager d’un grand vacarme.

Les propriétaires des maisons fissurées impuissants face au réchauffement.

Une maison fissurée à la suite de la sécheresse, au Mans, le 18 mars 2023. MANON CHEMINEAU POUR « M LE MAGAZINE DU MONDE »
Plus de dix millions de maisons individuelles construites sur des sols argileux sont menacées à cause des sécheresses successives. Une proposition de loi écologiste destinée à améliorer l’indemnisation des victimes sera discutée à l’Assemblée nationale le 6 avril.

Texte par Sevin Ray-SAHIN

« Timothy, 105 cm en 2010 », « 180 en 2022 ». Sur le mur de la cuisine de cette maison de la Sarthe, des traits et des chiffres marquent les tailles des petits-enfants. Christelle (le prénom a été modifié), 67 ans, aimait les mesurer à chacune de leur visite. Désormais, ce même mur est envahi par les fissures apparues dès 2011 et devenues crevasses depuis la sécheresse de l’été 2022. Timothy ne vient plus voir sa grand-mère de peur que la maison lui tombe dessus. Christelle elle-même a dû en partir cet hiver pour s’installer dans le studio de 28 mètres carrés de son compagnon. Impossible de se loger ailleurs avec sa retraite de 900 euros.

La maison subit les mouvements du sol argileux qui se gonfle d’eau lorsqu’il pleut et se rétracte en séchant. Le phénomène dit de retrait-gonflement des argiles (RGA) écarte les jointures des murs et menace les fondations. Plus de 10 millions de maisons individuelles, soit un peu plus de la moitié du parc français, sont exposées à cet aléa. « Les propriétaires des maisons fissurées sont les premières victimes du réchauffement climatique en France », assure Gwenahel Thirel, avocat spécialiste de la question.

Intégré au régime catastrophe naturelle, le RGA, dit « risque sécheresse », est indemnisé par les assurances lorsqu’un arrêté ministériel reconnaît l’état de catastrophe naturelle. Le RGA représente aujourd’hui le premier poste d’indemnisation du dispositif, devant les inondations. D’après la Caisse centrale de réassurance, la sécheresse de 2022 devrait coûter 2,9 milliards d’euros aux assureurs, un record depuis la création de la garantie catastrophe naturelle, en 1982.

Des sinistrés en manque de reconnaissance

Pourtant, toutes les communes qui en font la demande ne sont pas reconnues en état de catastrophe naturelle. « Malgré nos 170 sinistrés, depuis 2015 on rejette notre dossier sous prétexte que la ville ne respecte pas le critère hydrométéorologique », déplore Daniel Pluchon, chargé de mission risque naturel de la ville du Mans. Défini par Météo France, cet indice mesure le taux d’humidité des sols superficiels sur un périmètre carré de 8 kilomètres de côté, appelé maille géographique. Les données des 8981 mailles composant le territoire métropolitain s’appuient sur des modélisations mathématiques et non des mesures de terrain qui seraient trop coûteuses.

L’état de catastrophe naturelle est reconnu si les données sont les plus basses des cinquante dernières années. « Une durée très arbitraire », notait le rapport d’une mission d’information sénatoriale de 2019.

Une proposition de loi déposée par Europe Écologie-Les Verts visant à élargir ce critère et à améliorer l’indemnisation par les assurances sera discutée à l’Assemblée le 6 Avril. « Le sujet est d’une telle ampleur que l’on doit le prendre à bras-le-corps », estime la députée Sandrine Rousseau.

Le 17 Mars, l’élue a rencontré l’Association Urgence Maisons Fissurées-Sarthe, qui réunit 400 sinistrés, dont 180 arrivés à la suite de la sécheresse de 2022. Son Président, Mohamed Benyahia, 63 ans, dénonce une législation non adaptée et entend multiplier les recours au tribunal administratif pour contester les refus de reconnaissances de catastrophe naturelle. « Les recours ne servent à rien » prétend de son côté Xavier Jamois, maire de Dollon et Président de l’Association des Communes Sarthoises Victimes maisons fissurées, qui regroupent 147 municipalités depuis 2021. Les deux associations divergent sur la marche à suivre. Lors des réunions où se retrouvent sinistrés et élus, les insultes et reprochent fusent. Les deux présidents s’accordent pourtant sur un même constat : l’ordonnance publiée le 28 Février, et présentée comme un « jalon essentiel dans la prise en charge de ce phénomène climatique » par le ministère de l’économie, est insuffisante.

Le texte étend notamment l’état de catastrophe naturelle aux communes adjacentes aux mailles géographiques reconnues. « Mais on continue de prendre en compte le même critère météo », proteste Mohamed Benyahia. Sur le terrain et parmi les élus, ils sont nombreux à juger que le texte n’est pas la hauteur de l’enjeu. « Il faut une prise en charge dés les premières fissures », pointe Marietta Karamanli, députée socialiste (NUPES) de la 2è circonscription de la Sarthe. Christine Lavarde, sénatrice LR des Hauts-de-Seine, autrice du rapport d’information sur le financement du risque de RGA publié le 15 Février, approuve : « Sans prise en charge précoce, les sécheresses suivantes engendreront des dégâts plus graves et onéreux ».

En attendant, Mohamed Benyahia, dont la maison a des fissures depuis 2018, vit désormais avec des étais dans son salon « pour supporter le plafond ». Hind Normand, une autre sinistrée de l’association, se demande que faire « sa maison de rêve » achetée en 2017 à 600 000 euros. La villa avec piscine et terrain de tennis a commencé à se lézarder en 2019. Depuis l’été, le bassin est inutilisable et elle entend les murs craquer toutes les nuits. Avec douze autres propriétaires de Sargé-lés-Le-Mans, Hind Normand a déposé un recours contre l’État en septembre pour dénoncer la non-reconnaissance de son sinistre. « Il y a une immense détresse. Après avoir travaillé toute leur vie pour devenir propriétaires, ces personnes se retrouvent avec des maisons qui ne valent plus rien, alerte Gwenahel Thirel. On a des divorces, des dépressions, j’ai même un client qui s’est suicidé après quatre ans de procédure. »

Leurs maisons se fissurent, des habitants de la Sarthe attendent avec impatience la déclaration de catastrophe naturelle

Publié le 29/01/2023 à 11h30 Écrit par Olivier Quentin .

C'est en 2018 que Mohamed a constaté les premières fissures sur sa maison.
C’est en 2018 que Mohamed a constaté les premières fissures sur sa maison. • © France Télévisions

Depuis 2018, ils sont des centaines de Sarthois à se battre pour que l’Etat classe leur commune en catastrophe naturelle. Les sécheresses à répétition combinées au sol argileux où sont construites leurs maisons fissurent peu à peu leurs bâtisses. Une association réunissant près de 400 sinistrés tenait samedi son assemblée générale afin de définir la stratégie à adopter, pour faire enfin bouger les pouvoirs publics.

Mohamed pointe du doigt une longue fissure qui descend du toit de sa maison, quasiment jusqu’au sol. Large d’au moins 3 cm vers l’avancée du toit, elle se réduit progressivement et se divise en deux, une partie en direction du sol, l’autre qui court vers une fenêtre.

« Cet hiver ça s’est refermé, explique Mohamed Benyahia, et cet été, ça va repartir encore beaucoup plus large que l’été précédent. »

La maison de ce propriétaire qu’ont rencontré Thomas Chammah et Marc Yvard, est, comme beaucoup d’autres à Neuville-sur-Sarthe, victime de la sécheresse qui modifie la structure du sol. Cette commune au nord du Mans, est fondée sur un sol argileux, sensible aux variations d’humidité.

« Les fondations tombent et les murs se fissurent »

« Cet été, c’était terrible, ajoute Mohamed. L’argile se rétracte et en se rétractant, les fondations tombent et les murs se fissurent. L’hiver, quand il y a de l’eau, ça se referme et une fois que ça se referme ça bouge. Après, l’été ça s’ouvre. C’est comme si vous aviez un accordéon mais qui va de plus en plus large et ça met en péril l’ouvrage. »

Mohamed se souvient de cet été 2018, lorsqu’il a vu, alerté par son épouse, la première fissure.

« Ce jour-là, dit-il, je m’en souviendrai toujours. C’est comme si le ciel me tombait sur la tête. »

L'état de catastrophe naturelle n'a pas été reconnu pour la commune de Neuville-sur-Sarthe, au nord du Mans.
L’état de catastrophe naturelle n’a pas été reconnu pour la commune de Neuville-sur-Sarthe, au nord du Mans. • © GoogleMaps

Depuis, il a pris la présidence de l’association « Urgence Maisons Fissurées Sarthe » qui réunit des centaines de victimes de ces maudites fissures dues aux sécheresses successives. Des Sarthois, mais pas seulement.

« Quand les sinistrés m’appellent, je prends beaucoup de temps pour discuter avec eux, parce que je suis passé par là. On est dépourvu, déplore Mohamed Benyahia, on ne sait pas ce qui arrive. L’été 2022, j’ai dû répondre à plus de 200 appels. De la Sarthe ou au delà de la Sarthe. Quand vous avez des gens au bout du fil qui pleurent et que vous n’avez rien à leurs proposer, c’est très très dur. »

Recenser les bâtiments en danger

Les promesses des scientifiques qui annoncent des canicules et des sécheresses à répétition ne rassurent pas, évidemment, ce propriétaire qui tente de limiter les dégâts en posant ici et là des étais sur sa maison. A l’extérieur comme à l’intérieur.

Comme beaucoup, il espère que l’état de catastrophe naturelle sera déclaré pour sa commune, ce qui devrait débloquer des indemnisations des assurances. Car, pour le moment, pas un centime n’est versé à ces victimes.

►voir le reportage de Thomas Chammah, Marc Yvard et Valérie Brut.

L’association Urgence Maisons Fissurées Sarthe se bat pour la reconnaissance de catastrophe naturelle. • ©Thomas Chammah, Marc Yvard et Valérie Brut.

Avec l’association Urgence Maisons Fissurées, ces propriétaires agissent pour que les maires des communes concernées demandent au tribunal administratif de contester les décisions de non reconnaissance de l’état de catastrophe naturelle. Qu’il y ait un recensement des bâtiments en danger. Que des mesures de sauvegarde soient prises. Que les familles concernées soient assistées.

L’association appuie aussi les demandes des victimes que les assurances rechignent à indemniser alors-même que l’état de catastrophe naturelle a été reconnu. Des assurances qui font appel de cette reconnaissance en demandant de nouvelles expertises. Elle demande aussi à l’État une procédure de reconnaissance de catastrophe naturelle accélérée.

« Les maisons déjà fissurées se sont énormément dégradées »

« La sécheresse de 2022 est exceptionnelle, qui a battu tous les records, rappelle Mohamed Benyahia. Et les maisons ont souffert. Les maisons déjà fissurées se sont énormément dégradées et ça peut poser des gros problèmes. Certaines familles sont vraiment dans des difficultés très très graves. On a fait plus de 120 adhésions supplémentaires au mois de septembre. Et c’est la même chose dans les autres collectifs d’autres régions en France. »

Qui va payer ?

Invité à participer à l’assemblée générale de l’association ce samedi 28 janvier à Rouillon, à l’ouest du Mans, le député de la 3ème circonscription sarthoise Eric Martineau (Renaissance), confirme que les choses doivent évoluer.

« Il va falloir trouver une bonne solution, dit-il. Que ce soit entre les collectivités, les particuliers et puis les assurances. Il y a un vrai sujet, c’est de savoir qui est responsable, qui va payer tous ces dégâts. »

L’élu espère une table ronde réunissant toutes les institutions concernées pour élaborer une solution.

Sauf que l’urgence est là, que la situation ne peut que se dégrader pour tous ces propriétaires dont certains sont clairement en danger. L’heure n’est plus aux discussions.

réchauffement climatique environnement météo

Sarthe. Maisons fissurées : sa cheminée inutilisable, elle s’inquiète pour l’hiver

Cécile et sa famille font face depuis plusieurs années aux conséquences de leur maison qui se fissure un peu plus chaque jour. Elle s’inquiète pour l’hiver. 

Cécile maison fissurée Sablé-sur-Sarthe chauffage cheminée
Faute de pouvoir utiliser sa cheminée, fissurée, Cécile va devoir se chauffer avec un poêle à pétrole. ©Julie HURISSE/Les Nouvelles de Sablé

Par Julie Hurisse Publié le 19 Nov 22 à 18:00 

L’hiver arrive et Cécile et sa famille doivent faire face aux conséquences des fissures sur leur maison à Sablé-sur-Sarthe.

Les fissures s’empirent chaque mois, mais pour être qu’ils puissent être indemnisés et pour pouvoir engager les réparations, la ville doit être reconnue en état de catastrophe naturelle sécheresse

Ni en 2021, ni en 2022 ça n’a été le cas. 

Une importante fissure sur sa cheminée la rend inutilisable cet hiver.

Aucun cheministe ne veut la réparer pour ne pas avoir à engager sa garantie décennale

Cécile

Et l’utiliser serait très dangereux. « De la suie s’échappe par les fissures ainsi que du monoxyde de carbone. » 

Deux poêles à pétrole récupérés

Grâce à la Croix Rouge, ils ont pu récupérer deux poêles à pétrole, mais Cécile s’inquiète de la consommation. Une aide d’appoint qui n’a rien d’écologique.

Les politiques ont été nombreux à se déplacer pour constater les conséquences de la sécheresse chez la Sabolienne, mais aucune solution ne se dessine aujourd’hui et l‘hiver vient compliquer les choses.  

« Ça m’angoisse un peu » : à La Flèche, cette habitante voit sa maison se fissurer

Nathalie Dugenetay s’inquiète de voir apparaître de plus en plus de fissures sur les murs de sa maison, située à La Flèche. Une impressionnante lézarde traverse notamment l’un des murs du sous-sol, « qui porte la maison ».

Ouest-France Léa VIRIET et Yohann BOURGIN.

Publié le 19/09/2022 à 06h25

Nathalie Dugenetay, habitante de La Flèche, s’inquiète de voir d’importantes fissures apparaître sur les murs de sa maison, sur sa terrasse ou encore sur des murets.
Nathalie Dugenetay, habitante de La Flèche, s’inquiète de voir d’importantes fissures apparaître sur les murs de sa maison, sur sa terrasse ou encore sur des murets. | OUEST-FRANCE

« J’essaie de ne pas le montrer, mais ces fissures, ça m’angoisse un peu. » C’est pour « se renseigner » que Nathalie Dugenetay a assisté, comme 85 autres personnes, à la réunion publique proposée par l’Association urgence maisons fissurées (AUMF), mercredi 14 septembre à La Flèche.

De nombreuses fissures endommagent sa maison, construite en 1977 et dans laquelle elle habite depuis 2014. « Après l’avoir achetée, nous avons fait des travaux d’embellissement et retiré la tapisserie des murs et du plafond, retrace la femme de 53 ans. C’est là que nous avons vu des fissures dont nous n’avions pas connaissance avant. C’était petit, rien qui nous a inquiétés. Mon mari les a bouchés et a peint par dessus »

« Sous la chambre de ma fille »

Mais au fil des années, de nouvelles lézardes apparaissent, et celles déjà là prennent de l’ampleur. Vus de dehors, les murs de la maisons semblent pourtant en bon état : « Nous venons de faire l’isolation par l’extérieur, ça a masqué les fissures «  Tandis qu’à l’intérieur, plusieurs petites fissures se sont dessinées, principalement dans le couloir.

Une importante lézarde traverse le mur du sous-sol. | Ouest France

Les dégâts les plus impressionnants concernent le sous-sol : une lézarde large de plusieurs centimètres traverse l’un des murs. « Elle existait déjà en 2014 mais elle s’est agrandie. Le sous-sol porte toute la maison, relève Nathalie Dugenetay. Là, c’est juste sous la chambre de ma fille. Elle me dit qu’un jour elle va tomber dans le garage ! «  Une crevasse similaire est visible sur le muret du voisin.

Quant à la terrasse, elle est traversée par de nombreuses fissures partant de la maison en direction du terrain, et semble s’affaisser par endroit. « Les inondations n’ont pas dû arranger les choses » soupire la propriétaire en énumérant les dégâts. La quinquagénaire a en effet vu son sous-sol se remplir d’eau à deux reprises lors des intempéries, en Juin 2018.

En proie a des soucis de santé, la Fléchoise n’a, pendant longtemps, pas pris le temps de se pencher sur le problème. Elle s’en est finalement saisie il y a quelques jours, en voyant passer un article annonçant la réunion d’AUMF. Elle a fait venir un maçon pour en savoir plus.  » Il m’a dit que c’était du travail mal fait, et qu’il ne pouvait rien faire « 

Mais Nathalie Dugenetay pense, sans certitude, que l’explication est ailleurs.  » Des fissures peuvent apparaitre sur les maisons construites sur un sol argileux, explique Mohamed Benyahia, président d’AUMF. L’argile se rétracte avec la sècheresse, et gonfle avec la pluie. Cela produit des mouvements de sol. Le phénomène est amplifié par le réchauffement climatique. Pour s’assurer qu’il s’agit bien de se problème, « rien ne vaut une étude de sol approfondie ».

L’AUMF conseille en tous les cas aux propriétaires de maisons fissurées de se signaler auprès de la municipalité, afin qu’elle fasse « une demande de reconnaissance de catastrophe naturelle », indique Mohamed Benyahia. Ce que va faire Nathalie Dugenetay, qui espère surtout que « [s]a maison ne s’écroulera pas ».

Léa VIRIET

Maisons fissurées : Quelles sont les démarches à suivre ?

« On aimerait pouvoir disparaitre, on ne veut pas devenir les Resto du coeur des maisons fissurées » présentait, mercredi dernier, Mohamed Benyahia, président de l’association Urgence Maisons Fissurées (AUMF), lors d’une réunion publique à La Flèche. Mais « on ne peut que constater que les victimes de ce fléau sont de plus en plus nombreuses », soulignait Nicolas Chauvin, adjoint au maire de La Flèche, en charge de l’urbanisme.

En effet, la réunion a rassemblé 85 personnes salle Printania, dont bon nombre sont venues avec leurs épais dossiers sous le bras. Si certains n’ont constaté des fissures chez eux que très récemment, d’autres se battent pour être indemnisés depuis de nombreuses années.

Pour les uns comme pour les autres, l’AUMF les encourage, avant toute chose, à faire connaitre leur situation en mairie. Car c’est aux municipalités de faire remonter les demandes de reconnaissance d’état de catastrophe naturelle aux préfectures. « Cette reconnaissance peut avoir lieu même si vous êtes la seule personne victime de votre commune. Et il faut réitérer vos demandes chaque année », a insisté Mohamed Benyahia.

De 2018 à 2021, 39 communes sarthoises ont été reconnues en état de catastrophe naturelle, contre 166 qui, malgré leurs demandes, sont restées non-reconnues. C’est notamment le cas de La Flèche, ville adhérente de l’AUMF, où 23 propriétaires se sont fait connaitre en mairie. Un recours va d’ailleurs être déposé avant le 26 septembre 2022 pour réitérer cette demande de reconnaissance pour la ville. L’association a également annoncé, mercredi dernier, qu’elle avait demandé au Gouvernement une procédure accélérée, réservée aux cas d’urgence, craignant que la sècheresse de cet été ait des effets dévastateurs sur les sols.

Reste que toutes les fissures qui apparaissent sur les murs ne sont pas forcément dues à un problème de sol argileux. Elles peuvent, par exemple, être nées d’un défaut d’ouvrage ou du simple vieillissement du crépi. Selon l’association, seule une analyse de sol poussée, aussi appelée « diagnostic G5 » permet d’être fixé.

Et si c’est bien le sol qui est la cause des fissures, les solutions de réparation telle que l’injection de résine et l’installation de micropieux ne suffiraient pas à endiguer le problème, plus profond.

Yohann BOURGIN

Sarthe. Maisons fissurées : plus que quelques jours pour le recours

L’association Urgence maisons fissurées organise un recours collectif contre l’arrêté qui exclut 25 communes de l’état de catastrophe naturelle. À déposer avant le 26 septembre 2022.

Ouest-France Publié le 19/09/2022 à 18h06

Les sinistrés des communes non retenues en état de catastrophe naturelle n’ont plus que quelques jours pour agir.
Les sinistrés des communes non retenues en état de catastrophe naturelle n’ont plus que quelques jours pour agir. | OUEST-FRANCE

L’Association urgence maisons fissurées-Sarthe organise un recours collectif devant le tribunal administratif contre l’arrêté du 11 juillet 2022, publié le 26 juillet, qui exclut 25 communes sarthoises (liste ci-dessous) de l’état de catastrophe naturelle.

Le temps presse. « Le dossier collectif doit être déposé auprès de l’avocat de l’association avant le 26 septembre », indique Mohamed Benyahia, le président de l’AUMF. Le coût de la procédure (d’une durée de 18 mois) est d’environ 1 500 € TTC pour une commune, « à diviser par le nombre de dossiers déposés ». Les propriétaires qui souhaitent s’y associer doivent demander à leur commune les documents nécessaires et contacter l’AUMF : contact@asso-urgmf.fr ou au 06 51 58 24 88.

Les communes non reconnues

Beaufay, Champfleur, Coulaines, Coulans-sur-Gée, Domfront-en-Champagne, La Flèche, La Guierche, Le Bailleul, Juigné-sur-Sarthe, Neufchâtel-en-Saosnois, Nogent-le-Bernard, Notre-Dame-du-Pé, Rouillon, Rouperroux-le-Coquet, Sablé-sur-Sarthe, Saint-Calais, Saint-Mars-la-Brière, Saint-Martin-des-Monts, Saint-Paterne – Le Chevain, Sargé-lès-Le Mans, Savigné-l’Évêque, Ségrie, Teloché, Viré-en-Champagne, Yvré-l’Évêque.

Maisons fissurées : comment se faire indemniser ?

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Fissures, photo d'illustration
Fissures, photo d’illustration
Crédit: Pixabay

16 septembre 2022 à 6h00 par Hugo Harnois

Vous avez peut-être aperçu des fissures sur les murs de votre maison. Celles-ci pourraient être liées à la sécheresse de ces derniers mois. Plus de 10 millions de maisons seraient exposées en France, d’après le ministère de l’Écologie.

La sécheresse a impacté les agriculteurs, les producteurs mais aussi de nombreux propriétaires ayant leurs maisons construites sur un terrain argileux. « Quand il pleut, l’argile gonfle et lorsqu’il fait sec, l’argile se dessèche. Et en se rétractant, il libère de l’espace dans lequel s’engouffrent les fondations, s’il y en a », explique Mohamed Benyahia, président de l’association Urgences maisons fissurées Sarthe.

Depuis 2020, la loi ELAN rend obligatoire la réalisation d‘études de sol avant la construction de maisons individuelles dans des zones argileuses. « C’est mieux encadré », poursuit Mohamed Benyahia, qui assure que si la loi avait été instaurée avant : « on aurait pu éviter beaucoup de dégâts sur des maisons construites ces dernières décennies. »

Parcours du combattant

Cependant, si vous constatez des fissures sur votre maison et que vous pensez que ces dernières sont liées au phénomène de sécheresse, il faut se rendre à votre mairie et demander la reconnaissance d’état de catastrophe naturelle. Mais trop peu de communes sont reconnues comme tel, déplore le président de l’association. Selon lui, « cette reconnaissance est prononcée par la commission interministérielle, mais on ne sait pas qui y siège, quelles sont les modalités, etc… »

Une fois l’état de catastrophe naturelle reconnu dans votre commune, il faut faire la déclaration à son assurance dans les 10 jours qui suivent maximum. Mais malheureusement, les assurances ne jouent pas toujours le jeu, regrette Mohamed Benyahia : « si on est dans les clous, certaines compagnies d’assurance mandatent des cabinets d’experts, qui viennent sur place avec l’objectif de dire que ce n’est pas de la sécheresse. »

C’est pourquoi l’association conseille de s’entourer d’un expert en bâtiment pour éviter les mauvaises surprises. « Nous ce qu’on veut, c’est que tous les sinistrés demandent à leur compagnie d’assurance de faire une étude de sol. C’est le seul moyen aujourd’hui de déterminer de manière précise, scientifique et indiscutable si l’origine du désordre provient de la sécheresse, ou non », commente le président de Urgences maisons fissurées Sarthe.

Dans la Sarthe, l’association lance actuellement une campagne pour demander à tous les maires où il y a des habitants qui ont des fissures de faire une demande de reconnaissance d’état de catastrophe naturelle pour l’année 2022. Dans le département, plus de 600 maisons fissurées seraient concernées.

Sécheresse : la maison de ce couple se fissure de toutes parts

Le Maine Libre Jean-Christophe COUDERC Publié le 15/09/2022 à 08h44

Dans le quartier de Verron, à La Flèche, la maison de Patricia et Yves commence à se fissurer de toutes parts. La conséquence des sécheresses successives pour le couple, qui vit avec cette épée de Damoclès de voir la situation s’aggraver dans les années à venir.

La première fissure apparue en 2016 sur la maison de Patricia et Yves, entre le garage et leur lieu de vie. « Aujourd’hui on peut y mettre la main. »
La première fissure apparue en 2016 sur la maison de Patricia et Yves, entre le garage et leur lieu de vie. « Aujourd’hui on peut y mettre la main. » | LE MAINE LIBRE

L’impact de la sécheresse n’affecte pas seulement l’environnement ou le monde agricole. Pour certains propriétaires, que leur maison soit ancienne ou plus récente, le phénomène climatique est synonyme d’inquiétude, voire de stress. Construites sur des sols argileux, celles-ci subissent les mouvements liés au gonflement et au retrait de l’argile ce qui provoque l’apparition de fissures. À La Flèche, Patricia et Yves ne le savent que trop bien.

« On n’a pas voulu voir »

Le couple vit dans le quartier de Verron où il a fait construire un pavillon qu’il occupe depuis 2002. La première alerte, « c’était en 2016 » se souvient Patricia . Une lézarde était apparue sur la façade arrière, entre le garage et la partie habitation. La mère de famille reconnait qu’à l’époque, elle était un peu dans le déni. « On a vu, mais on n’a pas voulu voir… »

Les années suivantes, plusieurs propriétaires sarthois ont commencé à évoquer le problème, dont Mohamed Benyahia, qui préside aujourd’hui l’association Urgence Maisons Fissurées-Sarthe. Le couple était à la réunion constitutive, en 2019 au Bailleul, et y adhère depuis. Entre-temps, « on avait fait le rapprochement entre les périodes de sècheresse et les lézardes ».

Des fissurent commencent à apparaitre un peu partout

Patricia et Yves reconnaissent que leur situation n’est pas aussi dramatique que celle de certains adhérents de l’association qui en compte près de 160. « Cette année, des gens ont été obligés de quitter leur maison », précise Yves.

Aujourd’hui, la première lézarde apparue côté garage reste la plus importante. « De l’intérieur du garage, on voit le jardin » Une « ouverture » sur l’extérieur dont le couple se serait bien passé. Une autre grosse fissure a vu le jour sur le mur opposé, côté portail.

La partie habitation reste préservée, encore que. Des fissures commencent à apparaitre un peu partout. « Je surveille le carrelage parce qu’on a des affaissements de sol dans les angles », rapporte Patricia. « Quand un maçon est venu, il m’a dit d’être vigilante. Si ça pète dans le carrelage, il faudra qu’on se revoie ».

L’injection de résine : une solution coûteuse

« On surveille en se disant : pourvu que ça ne s’aggrave » confie Yves. « Aujourd’hui, la partie habitable est la moins touchée. Il y a des gens chez qui la famille ne vient plus par peur de dormir à la maison. Nous, on en est pas là. Mais, on sait que dés que cela a commencé c’est irréversible ».

Le couple a eu la curiosité de consulter une carte nationale qui indique les zones argileuses très denses. La sanction est sans appel : leur propriété se trouve sur une veine en aléa fort.  » Il y a bien une solution avec l’injection de résine. Mais c’est très cher. En moyenne 70 000€. On a fini de payer la maison il y a un an, est-ce que l’on remet une telle somme ? ».

« Une loi bien faite »

A La Flèche, une vingtaine de propriétaires se seraient signalés en mairie. « Il y en a sûrement plus » estime Yves. Tous étaient invités à la réunion proposée par l’association hier à la salle Printania. L’occasion de faire le point sur les revendications de ces « oubliés » de la sècheresse.

Dans l’immédiat ils demandent que les communes qui n’ont pas été reconnues cette année en état de catastrophe naturelle déposent un recours devant le tribunal administratif. La démarche doit être engagée au plus tard le 26 Septembre 2022.

« Mais ce qu’il faudrait », estime Yves, « c’est une loi bien faite. Que les choses soient claires et simplifiées ».