Commission de l’aménagement du territoire et du développement durable

Mercredi 14 décembre 2022

M.Jean-François Longeot, président. – Nous poursuivons nos travaux avec une table ronde consacrée au retrait-gonflement des sols argileux (RGA).

Vous le savez, ce phénomène de RGA pose des défis considérables à notre politique de prévention et d’indemnisation, sur les plans techniques, juridiques et financiers.

Le RGA se matérialise par l’apparition de désordres sur les maisons, qui peuvent à terme poser des problèmes de sécurité et de solidité du bâti, en plus de porter atteinte à la qualité de vie et à la valeur du patrimoine de nos concitoyens. Je pense à des fissurations sur le gros oeuvre et à des décollements, des affaissements ou des distorsions d’éléments de second-oeuvre.

Sols argileux : quels risques pour les habitations ?

Madame Nicole Bonnefoy : Cette disposition m’inquiète car elle pourrait conduire à « refermer » fortement le droit à indemnisation des sinistrés. Si vous imposez à tous les propriétaires exposés au RGA de mettre leurs maisons sur pilotis ou d’acheter des équipements correcteurs, cela peut représenter un coût très, très important. Pour rappel, la Caisse centrale de réassurance estimait à 285 milliards d’euros le coût potentiel des équipements à installer sur les maisons actuellement en zone d’aléa fort, ce qui représente seulement 3,8 millions de maisons, alors que ce sont près de 19 millions de maisons qui sont concernées par le RGA.

M. Mayeul Tallon, chef du bureau des marchés et produits d’assurance à la direction générale du Trésor (DGT). Le régime des catastrophes naturelles, dans lequel le RGA trouve sa place, est un trésor national méconnu. C’est notre vision, à la direction générale du trésor, de ce régime juridique de réparation ; pour autant, nous sommes conscients des difficultés que rencontrent nos concitoyens, des drames lorsqu’ils perdent leurs maisons.

M. Franck Le Vallois, directeur général de France Assureurs. Face au péril de la sécheresse, les assureurs sont aux cotés des sinistrés. L’exposition forte ou moyenne au RGA concerne 48 % de notre territoire et 54 % des maisons individuelles, ce risque peut conduire à de véritables drames pour nos concitoyens.

M. Didier Valem, chef de service à la direction des affaires techniques de la Fédération française du bâtiment. – Le flux de la construction neuve est bien traité depuis quatre ans, dans les aspects de contrôle. La difficulté tient au diagnostic pour sécuriser le bâti, donc à l’étape de la prévention, mais également pour l’ouvrage sinistré, parce que du diagnostic dépendent les réparations et l’éventuelle reconfiguration des ouvrages, avec des travaux de confortation, pérennes, ce qui demande en général un cycle saisonnier, avant les travaux pour traiter les fissures secondaires.

Mr Jean-François Longeot, président. – Nous travaillons sur le RGA depuis des années, plus de 30 000 communes sont concernées, nous avons tous des exemples de citoyens qui voient leur maison fissurée et qui ne sont pas indemnisés – ou qui peuvent l’être aussi, dans ma commune, une personne s’est vue indemnisée de 240 000 euros, soit le prix de sa maison

Des associations de consommateurs m’ont reproché, localement, de ne rien faire de concret lorsque je leur ai parlé de ce qui était et avait été mis en place à l’heure actuelle, et, effectivement, la réponse est souvent loin d’être à la hauteur des drames que vivent certains de nos concitoyens, en particulier des personnes âgées qui voient toute leur vie de travail quasiment réduite à néant quand leur maison fissurée ne vaut plus rien…

M. Mayeul Tallon. – Vous mentionnez le cas des retraités qui voient leur maison perdre toute leur valeur, mais je pense aussi aux jeunes ménages qui empruntent et dont la maison devient invendable, leur situation est critique elle aussi. L’application du critère de l’exceptionnelle gravité nous paraît poser plus de problèmes qu’elle n’en résoudrait. Il y a d’abord un problème d’échelle, puisque le risque porte sur la moitié des maisons individuelles – 10 millions sur 19,5 millions d’habitations individuelles.

Mr Jean-François, président. – Merci à tous pour cet échange, nous savons que nos concitoyens nourrissent une grande attente sur le sujet. Je regrette vivement l’absence de certaines administrations à notre table ronde.

Le Sénat est très attaché à ce dossier et veillera à ce qu’il soit mené à bien.

Je ne doute pas de la détermination de Nicole Bonnefoy à suivre cette question de très près.